Sonny Terry en version "dance floor"

Sonny Terry, dont on célébrera le 24 octobre prochain le centenaire de la naissance en 1911, s'écoute désormais à toutes les sauces. Voici une version "dance floor" de son "Whoopin' The Blues" réalisée avec notamment l'ajout d'une piste de percussions. Le "groove" de Sonny est tellement solide que le résultat est étonnant. Personnellement, j'adore...



 

"Peg Leg Sam" ou la poisse reçue en héritage...

"Si un jour il pleuvait de la soupe, tout le monde aurait une cuillère mais moi, j'aurais une fourchette": ainsi s'exprimait "Peg Leg Sam" dont le moins que l'on puisse dire c'est qu'il n'a pas été gâté par la vie. Mais sa jambe de bois ne l'a pas empêché de jouer de l'harmonica comme personne, allant jusqu'à y souffler avec ...son nez! En fait, l'instrument lui servait à faire prendre des vessies pour des lanternes à son public des "medicine shows", ces foires de charlatans ambulants qui ont existé jusque dans les années 70 dans le Sud des Etats-Unis.

Arthur Jackson, dit "Peg Leg Sam"
(18 décembre 1911 – 27 octobre 1977)

Ses enregistrements de référence - "Greasy Greens", "Lost John", "Peg's Fox Chase", "Fast Freight Train".

Sa vie, son oeuvre - Arthur Jackson, dit « Peg Leg Sam », est né le 18 décembre 1911 à Jonesville, une petite ville rurale de Caroline du Sud. Enfant, il s'initie à l'harmonica et en joue dans les rues pour subvenir aux besoins de ses cinq frères et soeurs. En 1930, en Caroline du Nord, il tombe sous un train en marche à bord duquel il essaie de monter et perd sa jambe droite. Il n'a que 19 ans.... Son inimitable bagoût lui permet d'être embauché comme musicien itinérant dans le « medicine show » du « "Chief Thundercloud", un Indien Potawotomi qui, en bon charlatan, vend un tord-boyau à ses contemporains en prétendant qu'il s'agit d'un élixir de longue vie. « Peg Leg » sera l'attraction vedette du show jusqu'en 1972, lorsque le "chief" passe de vie à trépas. Au début des années 70, Jackson enregistre parallèlement plusieurs galettes dont son grand'oeuvre « Kickin' It », qui est distribué en 1973 sous le label Trix. Notre homme y est accompagné, à la guitare acoustique, par Charles Henry "Baby" Tate et Henry "Rufe" Johnson dans un style rural qui alterne les morceaux instrumentaux et les monologues truculents. On y découvre un artiste hors normes qui joue de deux harmonicas à la fois --l'un avec la bouche, l'autre avec le nez-- avec une approche exubérante de l'instrument. Pour les spécialistes, « Peg Leg » est au « country blues » ce que John Coltrane est au « free jazz ». A partir de 1973, il tourne dans le circuit « folk » avant de décéder à 65 ans, le 27 octobre 1977, chez lui, à Jonesville. « Peg Leg » avait la réputation d’être un « looser », un malchanceux perpétuel mais avec un immense talent oratoire. Ainsi, écoutez bien "Greasy Greens", l'un de ses meilleurs titres: il y tombe en extase devant une assiette de haricots comme s’il s’agissait d’une jolie femme et, 5 minutes 30 durant, il en fait une description à vous faire saliver.
 
Pour en savoir davantage:

Visionnage conseillé - En 1976, le cinéaste américain Tom Davenport a consacré un documentaire à notre homme, « Born for Hard Luck » (« Né avec la poisse »). Un extrait de ce documentaire est utilisé dans « Le fabuleux destin d'Amélie Poulain », le film de Jean-Pierre Jeunet. A visionner absolument,  ce documentaire en "streaming" dans sa version originale anglaise  et intégrale (50 minutes) est là: (http://www.folkstreams.net/film,1).









Vidéo de la semaine: lorsque Mick Jagger joue faux...

En écoutant attentivement cette reprise (en 3D) de "Like a Rolling Stone", l'un des morceaux ayant projeté Robert Zimmerman au firmament, je me suis rendu compte que Mick Jagger jouait... faux! Faites le test vous-même. Le solo de Mick commence à 2'48" et notre diva joue un harmo en Fa. En ouvrant bien vos feuilles, vous vous rendrez rapidement compte  que le 4 aspiré est environ 1/4 de ton en-dessous. Pour les cinéphiles, la jeune femme en blouson rouge est Patricia Arquette, la soeur de Rosanna.


Pépite de la semaine: "Wild" Bill Phillips

Plusieurs abonnés à ce blog m'ont suggéré de poster davantage de pièces d'harmonica que celles publiées dans la rubrique "Vidéo de la semaine". Pour satisfaire cette demande de mes inestimables lecteurs, je vais mettre en ligne des harmonicistes obscurs et méconnus dont je chasse sans relâche les enregistrements depuis maintenant près de quatre décennies. Pour ouvrir la série, voici "Wild" Bill Phillips, un instrumentiste de la Louisiane dont on ne sait pas grand'chose sinon qu'il a enregistré à la fin des années 40 et au début des années 50.
Artiste: "Wild" Bill Phillips
Titre album: The Legendary Jay Miller Series, vol. 49
Titre morceau posté: "Pepple In My Shoe" (1'54")
Genre: instrumental
Label: Flyright n°514 (Grande-Bretagne)
Année de publication: 1988
Remastérisation: Studios CTS (Londres)
Production: Interstate Music Ltd, PO Box 74, Crawley, West Sussex, RH11 0LX, Angleterre

"Jaybird" Coleman: l'un des modèles de Sonny Terry

Il fait partie de ces héros oubliés du blues... « Jaybird » (« Le geai ») Coleman n'a enregistré que quelques faces dans les années 30 mais son jeu était d'une telle intensité et exécuté avec une telle maîtrise qu'il fut copié par nombre de ses contemporains. Sonny Terry a dit de lui qu'il avait été l'un de ses modèles. Plutôt que de "monter" vers le Nord des Etats-Unis où, de Kansas City (Missouri) à Chicago (Illinois), le blues mettait son costume de ville, il préféra "tourner" dans le Sud profond où il avait ses racines avant de disparaître dans l'anonymat au début des années 40.
Burl C., dit "Jaybird", Coleman
(20 mai 1896 - 28 janvier 1950)

Ses enregistrements de référence - Tous ses enregistrements ont été documentés chronologiquement sur "Jaybird" Coleman & The Birmingham Jug Band", un disque Document Records (DOCD-5140) qu'il est est relativement facile de trouver (photo de la pochette à droite ci-contre). Quand à sa discographie complète, elle a été établie par l'Allemand Stefan Wirz et se trouve ici.

Sa vie, son oeuvre - Né en 1896 quatrième enfant d'une famille de métayers installée à Gainesville (Alabama), « Jaybird » Coleman apprend, seul, l'harmonica dès l'âge de 12 ans. Il se produit les fins de semaine à des fêtes de voisinage, pour sa famille et ses amis. En 1917, alors que la "Grande Guerre" tire à sa fin en Europe, Coleman, également connu sous le nom de Rabbit's Foot Williams, est appelé sous les drapeaux. Il sert jusqu'en 1919 dans l'infanterie à Fort McClellan à Anniston (Alabama) où il joue devant ses camarades de chambrée. Ceux-ci lui donnent le sobriquet de « Jaybird » qui désigne un oiseau bruyant nichant en Amérique du Nord. Retourné à la vie civile, Coleman s'installe à Birmingham (Alabama) où il s'associe avec Big Joe Williams et le Birmingham Jug Band avec lesquels il « tourne » dans le Sud des Etats-Unis entre 1922 et 1924. Marié à Irène, il s'installe à Bessemer (Alabama) et joue dans les églises du coin, à des « parties » ou des pique-niques jusqu'en 1927, lorsqu'il enregistre à Birmingham ses premières galettes pour les labels Gennett, Silvertone et Black Patti. Il passe les cinq années suivantes à jouer en solo, soit dans la rue soit dans de petits clubs dans les régions de Birmingham-Tuscaloosa-Bessemer avant d'enregistrer une nouvelle fois en 1930, toujours avec le Birmingham Jug Band, à Atlanta (Géorgie) sur les labels Okeh et Columbia. Dans son « Histoire du Blues », le musicologue américain Paul Oliver décrit son style comme suit: « Sa technique s'apparentait aux chants d'esclaves que l'on pouvait entendre dans les champs de coton: il chantait une ligne musicale d'une voix puissante puis répondait avec l'harmonica ». Peu après, Coleman sombre dans l'anonymat... Il accompagne encore sa soeur Lizzie Coleman avant d'être admis en 1949 au Veterans Administration Hospital de Birmingham. Il meurt d'un cancer à Tuskegee (Alabama) le 28 juin 1950, à seulement 53 ans. Il est inhumé au Lincoln Memorial Gardens de Bessemer.

Pour en savoir davantage - "Blues Who's Who", Sheldon, Harris (1979), De Capo Press, page 125.

Ecoute conseillée - Je vous propose deux vidéos trouvées sur YouTube. Dans la première, Coleman interprète son célèbre "Man Trouble Blues (version Columbia Records, 1930). Dans la seconde, il joue le non moins connu "Coffee Grinder Blues"







Jean-Jacques Milteau: le "papy" français du blues et de la soul

Il prétend que l'harmonica, "c'est l'instrument du voyageur". De la porte d'Italie à la Grande muraille de Chine, d'Irlande à la Louisiane, de la savane zoulou à Saint-Ouen, le "ruine babines" aura conduit Jean-Jacques Milteau aux quatre coins de la planète. Et même sur la scène de l'Opéra de Paris. Cela ne l'a pas empêché de conserver la cheville mince et le cœur gros...
Jean-Jacques Milteau (17 avril 1950)

Ses complices - En plus de 40 ans de carrière, Jean-Jacques Milteau a joué avec, devant et derrière la crème de la crème. Voici quelques noms: Francis Cabrel, Maxime Le Forestier, Charles Aznavour, Didier Lockwood, Florent Pagny, Eddy Mitchell, Richard Bohringer, Jean-Yves, d'Angelo, Barbara, Michel Jonasz, Claude Nougaro, Manu Galvin (guitariste dont JJM dit qu'il est son "alter ego"), Patrick Verbeke mais aussi Little Milton, Mighty Mo Rodgers, Mighty Sam McClain, Gil Scott-Heron, Terry Callier, N'Dambi, Howard Johnson, Michelle Shocked, Demi Evans, Andrew Jones, Michael Robinson, Ron Smyth, n'en jetez plus...

Sa vie, son oeuvre - Soixante et un ans après avoir vu le jour, le 17 avril 1950, dans une famille modeste de la porte d'Italie à Paris, Jean-Jacques Milteau (JJM) est installé dans le paysage harmonical français comme le « papy  du blues », cette « musique du diable » qui, avec la « soul », traverse sa riche carrière musicale. JJM achète son premier harmonica après avoir entendu Bob Dylan, Sonny Terry et, révélation, l'album « Real Folk Blues », un « best of » de Sonny Boy Williamson II. En 1968, un boeuf avec des musiciens sur les marches du Sacré Coeur de Paris l'amène en studio où il croise les routes d'entre autres Renaud, J.J. Goldmann, Barbara et Yves Montand. A partir de 1976, il devient le « sideman » d'Eddy Mitchell qu'il accompagne sur scène tout en participant à plusieurs projets aux côtés de Bill Deraime, Chris Lancry, Alain Giroux, Jean-Pierre Castelain et du groupe Connection. Il enregistre trois vinyles sous son nom pour Le Chant du Monde -- « Special Instrumental Harmonica » (1973), « Blues Harp » (1980) et « Just Kiddin » en compagnie du guitariste Mauro Serri (1983). (1989)--, et se produit abondamment sur scène tout au long des années 80, polissant son éclectisme et sa virtuosité. En 1990 il enregistre « Explorer », recherche sur une utilisation de l¹harmonica diatonique hors des sentiers du blues: la galette lui vaut sa première Victoire de la Musique. En 1992, accompagné du guitariste Jean-Michel Kajdan, JJM assure la première partie des spectacles de Michel Jonasz au Zénith de Paris et en tournée. La même année parait « Blues Live » enregistré essentiellement au club Utopia. Puis en 1994, il publie l'album « Routes », ode à l¹instrument du voyageur. Commence alors une série de concerts qui vont l¹emmener dans plus de soixante pays et jusqu¹à l¹Olympia de Paris en 1999 pour la sortie de « Bastille Blues ». Le guitariste Manu Galvin est désormais le compagnon attitré de tous ses projets. En 2001 sous la houlette de Sebastian Danchin, Milteau enregistre à Memphis au studio Royal de Willie Mitchell. Il y invite quelques « pointures » américaines comme Little Milton, Mighty Mo Rodgers, Mighty et Sam McClain tandis Jay Newland est à la console et le bassiste Laurent Vernerey assure la direction musicale. « Memphis » lui vaut sa deuxième Victoire et la Sacem lui décerne Grand Prix du Jazz. En 2003, nouvelle aventure américaine: « Blue 3rd » voit se côtoyer Gil Scott Heron, N'Dambi, Howard Johnson, Hugh McCracken et Terry Callier. L'année suivante, il interprète à la Maison de la Radio un répertoire de son choix avec l¹Orchestre National de France dans un concert au profit de l¹association Musique et Santé dont il est le parrain. En 2006, c'est « Fragile », une production plus intime sur laquelle sont conviées les chanteuses Michelle Shocked et Demi Evans. Notre Milteau national propose à cette dernière de l¹accompagner sur scène pour une centaine de concerts en France, Espagne, Australie, Nouvelle Zélande et Nouvelle Calédonie. Une autre tournée en compagnie du bassiste Felton Crews et du guitariste Junior Boy Jones, aboutira à l¹album « Live, Hot'n Blue » (2007). Une nouvelle formule, en compagnie des chanteurs Ron Smyth et Michael Robinson apparaît sur le disque « Soul Conversation » en 2008. Enfin en 2011, il crée en compagnie du comédien Xavier Simonin, une adaptation de «L'or » de Blaise Cendrars.

Discographie - "Spécial instrumental" (1973); "Blues Harp et Mojo" (1981), "Just Kidding" (1983), "Blues Harp" (1989), "Explorer" (1991), "Le Grand Blues Band et J.J. Milteau" (1992), "Live" (1992), "Routes" (1994), "Merci d'être venus" (1996), "Blues live" (1998), "Bastille blues" (1999), "Honky Tonk blues (live)" (2000), "Memphis" (2001), "Blue 3rd" (2003), "Fragile" (2006), "Live, hot n'blue (live)" (2007), "Soul conversation" (2008).

Directeur de collection - "Inspiration, 22 Great Harmonica Performances" 1 et 2 (2002 et 2005), "Bon Temps Rouler, La playlist idéale de JJM" (2006), "Bon Temps Rouler, Spécial Alligator" (2008), "Harmonicas" (2009). JJM a par ailleurs collaboré à plusieurs dizaines d'autres galettes et publié plusieurs méthodes d'apprentissage de notre instrument.

Visionnage conseillé - Pour ceux qui ne l'auraient pas encore vu, "Joueur de blues, souffleur de rêve", le documentaire de Jean-Marie Pasquier (1996), est incontournable. Je l'ai retrouvé sur un site japonais:www.tudou.com/programs/view/sKpKOzf3QPkidéo/.
Autre vidéo intéressante que je vous propose ici: "Jack The Man", un titre de "Fragile" (2006) où JJM fait équipe avec les suspects habituels, à savoir Manu Galvin à la guitare et Demi Evans au chant.
Contacts:

Les CDs du mois: Jers, Zlap, Gazell et Levy

Plusieurs abonnés à ce blog m'ont demandé pourquoi je ne rendais pas compte régulièrement de l'actualité discographique de notre instrument. Réponse: parce que d'autres le faisaient déjà, et cela bien mieux que je ne saurais le faire. Pour néanmoins satisfaire à l'empressement que certains ont mis à me faire signaler les nouvelles parutions, voici, en quelques lignes et quelques photos, ce qui est sorti --ou doit sortir-- des presses. En vous souhaitant bonne écoute...

Artiste: Filip Jers (Suède)
Titre: "Spiro" ("Je respire" en latin)
Titres composés et interprétés par Filip Jers
Parution: 04 mai 2011 Stockholm
Label: Fojablue Records FRCD01
Vente: Paypal
Phone: (+46) 768.08.25.50
Email: filip.jers@gmail.com
Contacts: site, Facebook, YouTubemyspace
Artiste: Greg Zlap (France)
Titre: "Air"
Parution: 22 mai 2011 Paris
Label: Le Chant du Monde Variété 2742027
Contacts: site, Facebook, myspace
Artiste: PT Gazell (Etats-Unis)
Titre: "Two Days Out"
Parution: mai 2011 Kingston Springs (Tennessee)
Label: MissMax Music 884501525312
Adresse:P.O. Box 271, Kingston Springs, (Tennessee) 37082-0271
Contacts: site, Facebook, YouTube, myspace
Artist: Howard Levy (Etats-Unis)
 Titre: "Rocket Science"
Parution: 17 mai 2011 Etats-Unis
Label: eOne Records


Vidéo de la semaine: quand Estrin se lâche sur son "chro"...

Cela s'est passé en 2007 quelque part en Californie. Rick Estrin, l'harmoniciste de feu "Little Charlie and the Nightcats", se lâche sur son Hohner Super Chromonica 270 (photographié ici à gauche), avec "Smart Like Einstein", une pièce de son cru. Et, l'influence de George Harmonica Smith aidant, ça swingue d'enfer...

DeFord Bailey: la première "star" noire de la musique "country"

C'est l'histoire d'une légende oubliée, puis retrouvée. DeFord Bailey fut le premier harmoniciste noir à atteindre le statut de "star" en se produisant entre 1927 et 1941 au "Grand Ole Opry", une émission de radio "country" qui est toujours à l'antenne chaque samedi soir, 86 ans après sa première diffusion en 1925 depuis Nashville (Tennessee). Cette exceptionnelle longévité dans le temple de la musique "blanche" des Etats-Unis fut brisée par une dispute légale sur ses droits d'auteur de sorte que Bailey termina sa vie comme cireur de chaussures...

DeFord Bailey (14 décembre 1899 - 2 juillet 1982)
Ses enregistrements - En 1927 et 1928, DeFord Bailey a publié sur les labels Brunswick, Vocalion, Victor-RCA et Bluebird. En 1970, il a effectué un certain nombre d'enregistrements "privés" pour Revenant, publiés au début des années 90.
Ses titres de référence - "Fox Chase”, “Old Hen Cackle”, “Ice Water Blues”, “Davidson County Blues"
Sa vie, son oeuvre - Petit-fils d'esclave né en 1899 à Bellwood, dans le Tennessee profond, Bailey commence à jouer de l'harmonica dès l'âge de trois ans, alors qu'il vient de contracter la poliomyélite et que les médecins lui imposent de garder la chambre. Il apprend parallèlement à jouer de la guitare, du banjo, de la mandoline et du violon. En 1918, il s'établit à Nashville (Tennessee) où il commence à se produire. Son premier enregistrement radiophonique date du 19 juin 1926 sur la station WSM de la ville. En 1927, il interprète pour la première fois la pièce qui le rendra célèbre, « Pan American Blues » au « Grand Ole Opry », une émission de musique « country » diffusée chaque samedi soir depuis Nashville à l'initiative de George D. Hay. La même année et la suivante, Bailey enregistre plusieurs disque de solos d'harmonica: l'artiste est alors à l'apogée de sa carrière et tourne avec les plus grands artistes « country » de l'époque, Dave Macon, Bill Monroe et Roy Acuff. Ce qui ne l'empêche pas d'être discriminé en vertu des lois raciales de l'époque. Plus que son immense talent, son comportement discret et son apparence irréprochable --il était toujours tiré à quatre épingles-- le font pourtant accepter parmi les grands interprètes –blancs-- du genre. Son influence sur notre instrument est alors prépondérante et nombre de joueurs tentent d'imiter son style. En 1941, un différend légal l'oppose à la BMI-ASCAP, la Sacem américaine, sur les droits d'auteur et il ne peut plus se produire à la radio. Cette dispute –Bailey conteste la misère qui lui a été payée pour ses enregistrements-- mit fin à sa carrière: il ne monte plus sur scène et se met à cirer des chaussures et à louer des appartements dans sa bonne ville de Bellwood pour survivre. En 1974, il accepte pourtant de refaire une unique émission de l' »Ole Opry », devenu entretemps une émission télévisée brassant des millions de dollars, avant de disparaître sans le sou et dans l'indifférence générale en 1982. En 2005, à la suite d'une rétrospective de sa carrière réalisée par PBS, la radio publique américaine, Bailey est accepté au Country Music Hall of Fame de Nashville, le panthéon des « stars » de la musique « country ».
Ecoute conseillée:
- “Harp Blowers 1925-1936″ sur Document (l'ensemble de ses premiers enregistrements)
- “The Legendary DeFord Bailey-Country Music’s First Black Star” sur Revenant (enregistrements privés effectués dans les années 70).
- “Harmonica Rarities” sur Westone (double CD)
Pour en savoir plus:
http://defordbailey.info/
http://www.pbs.org/deford/
http://wn.com/DeFord_Bailey/
http://www.npr.org/programs/lnfsound/stories/001124.bailey.html
"DeFord Bailey: a black star in early country music", David C. Morton et Charles K. Wolfe, University of Tennessee Press, Knoxville 1991
                          
(Copyright: Dennis Gruenling 2011 - Adaptation: Robert Koch)


Vidéo de la semaine: j'en ai les bras Balland...

Marko Balland a des couilles et, comme DSK, il n'a pas peur de les montrer. Harmoniciste de rock doté d'un style percutant et, accessoirement, d'un rack d'effets, notre petit Français s'attaque ici à un monument, le "Whole Lotta Love" de Led Zeppelin! Le résultat est à la hauteur du talent de Marko... Attachez votre ceinture car la purée qu'il envoie ici va vous coller aux vitres... Le son est EEEEEEEENORME (j'aimerais bien connaître la chaîne d'effets: Marko la donne dans les commentaires) et l'agressivité du jeu hallucinante. Ecoute déconseillée en présence de votre femme de chambre... En photo, Jimmy Page interprétant la pièce le 24 août 2008 lors de la cérémonie de clôture des  JO de Pékin.



Contacts:
http://www.myspace.com/markoharp
http://commarkoharp.myzik.eu/
http://www.facebook.com/pages/Marko-Balland/191515470318

Le nouveau Thunderbird de Hohner présenté par Joe Filisko

Dans deux posts publiés, le premier, le 14 mars et le second, le 05 mai, j'avais présenté puis passé au banc d'essai le "Thunderbird", un nouveau diatonique proposé dans neuf tonalités graves par Hohner. Dans les deux vidéos qui suivent, l'un des concepteurs de cette nouvelle ligne d'instruments dérivée du "Marine Band 1896", Joe Filisko, l'un des customiseurs les plus reconnus sur la planète, joue de ces harmonicas et explique --sorry, en anglais seulement-- leur conception et leur potentiel musical. Rappelons que le "T-Bird" sera présenté en avant-première en France par le détaillant parisien Major Pigalle au prochain festival de Montlhéry (Essonne), le 21 mai, et à Harmonicas sur Cher, qui aura lieu du 1er au 04 juin à Saint-Aignan (Loir-et-Cher). J'attends vos réactions...

Ces vidéos sont publiées avec l'aimable autorisation de David Barrett et de sa "School of the Blues"

Boîtes d'harmos: entrez dans l'intimité des grands (saison 3)

Suite de ma série sur les boîtes d'harmos des grands et des moins grands dont vous pourrez retrouver la "saison 1" ici et la "saison 2" ici.

Fernando Maldonado (USA) et deux autres amateurs...
Une boîte Lee Oskar: impressionnante!

Les "Slim's Custom Cases": http://www.facebook.com/pages/Slims-Custom-Cases/198124183561282?ref=ts



Örjan Hansson (Suède), Dany Hord (USA) et Kenny B. (USA)


Will Scarlett, l'harmoniciste de Hot Tuna, Glenn Woodhouse (USA) et un amateur sans bretelles mais avec ceinture...



Le nouveau Thunderbird de Hohner au banc d'essai

Le 14 mars dernier, je vous avais présenté le "Thunderbird", un nouveau diatonique proposé dans neuf tonalités graves par Hohner. Voici, passé au banc d'essai, cet instrument qui sera
présenté aux prochains festivals de Monthléry et de Saint-Aignan.

Le "T-Bird": neuf tonalités graves, du "low Fa" au "low low Fa" - Officiellement dévoilé début avril par Hohner à la "Musikmesse" de Francfort (Allemagne), le "Thunderbird" est la troisième déclinaison effectuée par la firme de Trossingen de son "Marine Band" (MB) 1896, son vaisseau-amiral, après le MB "Deluxe" sorti en 2005 et le MB "Crossover" mis sur le marché en 2009. Ce nouveau dix trous est actuellement proposé en Allemagne en neuf tonalités graves et extra graves: "low Fa", "low Mi", "low Mi bémol", "low Ré", "low Do", "low Si bémol", "low La", "low Sol" et "low low Fa". Avec le MB "T-Bird", Hohner vise un double objectif: compléter sa gamme diatonique avec des accordages dans les tonalités graves déjà disponibles depuis plusieurs années chez son concurrent Seydel mais également continuer à développer sa ligne MB avec le concours de Joe Filisko, "customiseur" de réputation mondiale qui signe le nouveau modèle.


Joues des capots rabattues - A la prise en mains, le "T-Bird" ne se distingue pas véritablement de son grand-frère, le "Crossover": même sommier en bambou laminé, mêmes capots en acier inoxydable fixés à l'aide de quatre vis d'assemblage (ici, pas d'écrous!). Un examen plus attentif fait voir que les dents du sommier et les débords de plaques ont été arrondis pour, visiblement, donner le meilleur confort de jeu possible. Le capot supérieur est serti, en bas à droite, à côté de la cartouche "Marine Band", du monogramme de Joe Filisko qui a développé le modèle avec les ingénieurs de la firme allemande. En retournant l'instrument, l'on remarque que les joues des capots ont été complètement rabattues pour donner une ouverture et une projection optimales.



Capot inférieur conique - Mais c'est le capot inférieur qui révèle l'une des améliorations majeures du "design" de ce nouveau MB: son ergonomie conique empêche en effet le cognement des anches aspirées, plus longues dans les tonalités basses que dans les tonalités traditionnelles. "Il fallait donner aux lamelles suffisamment d'espace de résonance, notamment dans la première octave où les anches sont les plus longues", a expliqué Filisko au Lover bleu à Francfort. Ce design, qui aboutit à "enfler" la partie gauche du capot inférieur comme le montre la photo ci-contre, a été imaginé et est appliqué par le luthier américain depuis plusieurs années. Mais sa traduction industrielle pour le MB "T-Bird" a contraint Hohner à mettre au point, non sans mal, une plieuse spéciale. Avec des résultats probants: dans toutes les tonalités essayées, aucune lamelle n'a cogné sur le capot, même sur le "low low Fa".

Le laiton plutôt que l'acier - Autre nouveauté, le profilage des anches. Il  s'agit d'un aspect essentiel de l'instrument compte-tenu des tonalités retenues. Pour obtenir une réponse franche et constante dans les registres les plus graves, Hohner a, ici, une nouvelle fois retenu le laiton comme matériau pour les plaques et les anches. Et cela même si la tentation a un moment existé à Trossingen d'utiliser l'acier, à l'instar de Seydel pour son modèle 1847 aux lamelles inoxydables et prétendues indestructibles. Pour éviter de devoir apposer de la soudure sur le bout des lamelles, les anches ont été usinées dans une couche de métal plus épaisse. Trois vis Philips sont par ailleurs utilisées pour fixer les plaques au sommier, de sorte que l'ensemble est facilement démontable aux fins de réparation, de nettoyage, d'ajustage et  de "customisation".


Totalement compatible - L'instrument a par ailleurs été accordé de la même manière qu'un MB "Classic" ou qu'un MB "Deluxe de manière à bien s'adapter à un jeu "blues". Il est en outre totalement compatible avec ses deux grands frères, "Deluxe" et "Crossover". Enfin, il est livré dans un étui en néophrène rigide muni d'une fermeture éclair et d'une boucle en élastomère pour le port à la ceinture.



Autour de 90 euros - Alors, le prix! Selon le nouveau patron de Hohner France, François Billecard, le MB "T-Bird" sera proposé aux alentours de €90,- par le détaillant parisien Major Pigalle au prochain festival de Montlhéry (Essonne), le 21 mai, et à Harmonicas sur Cher, qui aura lieu du 1er au 04 juin à Saint-Aignan (Loir-et-Cher). Dernière question: comment ça sonne? Pour permettre à chacun de se forger une opinion, voici une vidéo publicitaire récupérée chez Hohner dans laquelle Steve Baker, l'autre concepteur de ces nouveaux instruments, joue sur un "low Sol". Impressionnant!


(Photos: copyright Le lover bleu - Jean-Christophe Verhaegen)

Vidéo de la semaine: le sosie de Muddy Waters

Cela s'est passé le 11 avril 2011 aux studios d'enregistrement Comep à Sao-Paulo (Brésil). Mud Morganfield, le fils aîné de Muddy Waters, y enregistre avec le Igor Prado Blues Band. A regarder la vidéo, l'on se surprend être bluffé par la ressemblance entre le fils et le père. Non seulement les traits physiques et les mimiques sont-ils les mêmes, mais la voix de "Mud" est frappante de similitude avec celle de "Muddy". A l'harmonica, c'est Ivan Marcio qui officie...

Franco de Gemini: pour toujours, l'homme à l'harmonica

 

Quel harmoniciste, même débutant, ne connaît pas le "riff" d'"Il était une fois dans l'Ouest", le western spaghetti de Sergio Leone sorti en 1968? Moins célèbre est le nom de l'instrumentiste qui grava ces trois notes lancinantes de la bande-son d'Ennio Morricone. Il s'agit d'un autre Italien, Franco de Gemini, 82 ans, qui a joué dans plus de 800 musiques de film au cours de ses 55 ans de carrière. Pour bien vous (re)mettre dans l'ambiance, voici cette petite musique qui a fait le tour du monde:


Chromatique ou diatonique - Ce n'est évidemment pas Charles Bronson --qui joue le rôle d'Harmonica--qui a enregistré le "plan" avec l'harmonica diatonique qu'il trimballe à son cou dans le film et qui en est l'une des clefs. Dans plusieurs interviews disponibles sur l'internet, de Gemini explique que Morricone lui avait expliqué à son arrivée au studio d'enregistrement qu'il avait trois notes pour l'une des séquences cruciales du film: celle où "Harmonica-Bronson" jeune, les mains liées dans le dos, soutient avec ses épaules son frère, pendu par les méchants. "J'ai fait remarquer à Morricone que l'acteur avait les mains attachées dans le dos et qu'il lui était dès lors impossible de se déplacer sur l'instrument. Morricone m'a répondu: +Nous devons faire ce que nous suggère le scénario: avec l'harmonica coincé entre les dents, il doit pouvoir jouer ces trois notes+". Voici la scène en question:


Double note - Un peu plus loin dans la séquence, Bronson enfonce l'harmonica dans la bouche d'Henri Fonda. A ce moment, on entend un double note sur la bande-son. Interrogé sur la manière dont il avait produit cette "double note", Franco de Gemini a expliqué: "J'ai créé une division dans ma bouche (sic!) pour la créer. J'y ai aussi mis mon coeur et mon âme". Ajoutez un peu de réverbération et vous obtenez une complainte inquiétante et magnifique, voire l'une des plus inoubliables musiques de film. Voici la séquence: 



Sosie de Lino Ventura - Interprète mais aussi compositeur et producteur, fondateur dans les années 50 du "Club Harmonicisti Torinesi" ("Club d'harmonica turinois"), Franco de Gemini, qui ressemble à s'y méprendre à notre Lino Ventura, dirige également le label "Beat records", reconnu comme l'un des plus réputés dans la production de musiques de films mais également diffuseur de jazz et de musique classique. Franco de Gemini
enregistra sa première musique de film pour "Pain Amour et Fantaisie", un film de Luigi Comencini sorti en 1953. On le retrouve ensuite comme interprète, éditeur ou producteur (voire les trois) dans nombre d'autres longs-métrages: "Pour quelques dollars de plus" et "Le bon la brute et le truand" de Leone, "They call me Trinity", un autre western spaghetti avec Terence Hill et Bud Spencer dans les rôles principaux, "Mort à Venise" de Luchino Visconti , "Manhattan" de Woody Allen, "La Marche triomphale" de Marco Bellocchio, "Le Ruffian" de José Giovanni, et tant d'autres encore...

Autobiographie - En 2006, Franco de Gemini a écrit et publié son autobiographie sous le titre "From Beat to Beat, Memoirs of the Man of the Harmonica". Disponible en italien et anglais, cet opus abondamment illustré contient un CD de 19 titres qui nous permet de mieux découvrir ce personnage hors du commun.

Contacts:
Internet:
http://www.beatrecords.it/
Adresse postale:
Beat Records - 16, via Filippo Nicolai - 00136 Roma (Italia)


"Ze riff" - Et pour finir, voici notre homme, son harmonica et sa musique. Pour ceux que cela intéresse, le "riff" de "L'homme à l'harmonica" se joue (sur un chromatique en Do) sur le 6 aspiré, le 5 soufflé (tirette enfoncée) et le 6 soufflé...

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